Toutes ces photos de pub qui nous montrent de beaux bateaux échoués sur des plages magnifiques des pertuis charentais, devant de charmants bois de pins parasols, peuvent nous laisser croire que « beacher » est le rêve de tout marin un peu poête. Mais plus que le chant des muses, c’est le ricanement du diable qu’on entendrait, car c’est là que les ennuis arrivent en foule… Ici ce n’est pas la mer qui est dangereuse, mais la côte! Beacher, est un art, pour naviguer autrement.
Beacher sans soucis est plus difficile qu’on aimerait le croire et avant toute chose, on prendra garde à vérifier comment sont les fonds ? Dans notre eau souvent maronnasse, pas facile à savoir sans avoir vu avant à basse mer, ou avoir des renseignements sûrs. Alors il suffit d’un caillou acéré ou d’une ferraille abandonnée là ; et bonjour la voie d’eau et les réparations qui coûtent cher, sans parler du ouiquènde foutu de chez foutu.
On prendra quelques précautions : sonder à l’aviron, puis juste avant que le canot se pose, descendre et faire le tour à pied.
Autre version : cette belle plage avec eau calme le matin, apparamment idéale pour beacher et piqueniquer dans un paysage de rêve, pourra devenir l’enfer le soir quand la marée aura remonté : très clapoteuse voire « ressacqueuse ». Voyez le tableau : le canot qui tosse et se fait repousser vers le haut de la plage par les rouleaux, le puits de dérive qui se remplit peu à peu de sable et de graviers qui vont coincer la dérive en position haute, la coque à moitié remplie par l’eau qui éclate sur les flancs et saute par dessus le liston, les équipiers qui se trempent jusqu’à la ceinture pour essayer de repousser le bateau vers le large… Ne riez pas : ça s’est vu, et pas que des débutants.
COMMENT ÉVITER DES MÉSAVENTURES AU « BEACHAGE »?
TENIR COMPTE DE LA MÉTÉO
La brise sera-t-elle levée quand la marée remontera et lèvera-t-elle du clapot ?
Ou plus traitre encore : une houle venue de loin arrivera-t-elle dans le coin au mauvais moment ? Les prévisions météo vous donneront rarement des réponses sûres sur la houle. Voici tout de même un site qui donne des prévisions de houle distinctes des prévisions de vagues du vent : http://marine.meteoconsult.fr/ onglet « Plans d’eau »
Cette houle contournera-t-elle la pointe dont on attend protection ? Est-ce que telle côte y est sensible ? L’expérience des lieux par de nombreux types de temps est précieuse.
Voyez cette image des plages de la pointe d’Arçay (côte nord du Pertuis Breton) : voici un joli vent de terre, ENE, qui ne lève que des vaguelettes sur la mer, mais une vielle houle d’Ouest crée un ressac du diable sur la plage. Imaginez que vous soyez arrivés avant que la houle soit présente : le calme de la plage aurait trompé votre confiance !
CHOISIR SON ENDROIT
Cet arsignale plusieurs endroits sûrs. Il y en a d’autres sans doutes, explorez-vous mêmes et partagez votre savoir!
Voici tout de même quelques règles générales adaptées à nos Pertuis.
Les plages ont souvent (pas toujours) 2 pentes : la plage proprement dite, celle des baigneurs, avec du sable en pente marquée ; et en dessous un estran plus ou moins sablo-vaseux, à pente très faible, souvent occupé par des parcs à huitres ou des bouchots mytilicoles.
Sur la plage proprement dite, il y a souvent du ressac. En revanche, échouer sur la pente faible de l’estran ne pose pas de problème de ressac. Il suffit en plus de tourner le canot face au large avant qu’il soit tout à fait échoué, puis de porter à pied le mouillage plus au large une fois la marée descendue ; dès que le canot flottera à nouveau on se déhalera dessus pour arriver dans des fonds suffisants pour pouvoir godiller ou descendre un peu la dérive, et s’éloigner de la côte.
La photo en tête de cette page a été prise sur le bas de l’estran à la pointe de Sablanceaux, à l’ouest du pont de l’ile de Ré, côté Vendée : On y voit le départ d’un groupe qui avait échoué en bas de la plage (faible pente) le temps de pique-niquer en haut de la grève, à l’abri des dunes. Pour faciliter le départ les canots ont été échoués tournés vers le large ; mouillages portés au large pour faire face aux vagues lorsque l’eau remonte.
Et si on risque de devoir récupérer le canot à marée haute, alors qu’on ne peut l’atteindre qu’en se mouillant jusqu’aux « genouilles » voire plus haut, une solution : le va-et-vient (de préférence étrave vers le large, contrairement au schéma explicatif ci-dessous).
Ça permet de haler le canot à terre à marée haute pour, par exemple, y récupérer les allumettes oubliées à bord, puis de le renvoyer au large. Attention : si le bout du va-et-vient traverse la plage, des promeneurs peuvent s’y prendre les pieds et vous gâcher la soirée.